Quand le gouvernement expérimente de nouveaux dispositifs pour contrer la désindustrialisation




En janvier 2013, l’État français a temporairement repris une usine de papeterie située dans l’Eure. Dans une France qui plie sous les coups successifs de la désindustrialisation, la nouvelle a été accueillie avec enthousiasme. Mais cet évènement ne signe en rien un retour à une politique de nationalisation. À bien y regarder, il s’agit plus d’une expérience qui pourrait inspirer une nouvelle forme de soutien aux entreprises industrielles.



Le 23 janvier 2013, M-Real, papetier finlandais, a cédé son usine de production située à Alizay dans département de l’Eure. À l’heure où l’incertitude pèse encore quant à l’avenir de nombreux sites industriels français comme celui de Florange, l’État s’est donc porté acquéreur de cette petite usine papetière. On pourrait être tenté de voir dans cette expérience une tentative de retour aux politiques de nationalisation que certains jugeraient sans doute nécessaires. Il n’en est rien.
 
Le rachat de l’usine d’Alizay s’apparente en effet plus à une expérience de politique publique qu’à une véritable reprise. L’État n’a en effet été propriétaire de l’usine que pendant une heure, le temps de réaliser sa transmission à Double A, une société papetière thaïlandaise s’étant portée acquéreur.
 
Le département de l’Eure a ainsi racheté le site d’Alizay à M-Real pour le montant de 22 millions d’euros. L’administration départementale a ensuite revendu son acquisition dans la foulée à Double A au prix de 18 millions d’euros. Le département a également conservé l’équivalent de 4 millions d’euros de patrimoine foncier par la suite placé sous la responsabilité de l’établissement public foncier de Normandie.
 
L’objet de la transaction est en fait simple. Le propriétaire d’origine, M-Real, souhaitait fermer le site d’Alizay, mais ne voulait pas se résigner à céder ses infrastructures à un éventuel concurrent. Pour éviter une fermeture et toute destruction d’emplois supplémentaire, l’État s’est donc porté acquéreur de l’usine et s’est chargé de trouver lui-même un repreneur définitif. En somme, la nationalisation de l’usine d’Alizay n’a jamais été faite pour durer. Le jour de sa réalisation, l’opération a été qualité de « micronationalisation temporaire » par Arnaud Montebourg, le ministre du Redressement productif ; une formule qui souligne bien l’objectif du dispositif.
 
Le concours de l’État dans le bon déroulement de cette reprise a permis de préserver plus de 150 emplois industriels. Le bilan peut paraître maigre, mais l’expérience d’Alizay illustre la faisabilité de ce type d’opération. À une époque où devient difficile pour les entreprises d’assumer les coûts d’une cession, le gouvernement s’est peut-être trouvé un nouveau marché politique et un nouveau statut de partenariat auprès des acteurs économiques. Reste à savoir, si l’idée fera des émules parmi les gouvernants à l’avenir.


24 Janvier 2013