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"Non, les auto-entrepreneurs ne rêvent pas tous d'être salariés"





Dans une tribune, Antoine Chatelain, co-fondateur de Wecasa, plateforme leader dans la réservation de soins de beauté à domicile en ligne, revient sur une récente décision de la Cour de cassation.



Contrôle et pouvoir de sanction

Le 28 novembre 2018, la chambre sociale de la Cour de cassation requalifiait en contrat de travail le contrat liant un livreur à vélo à une plateforme de livraison de repas. Or, estime Antoine Chatelain, "la question n'est pas de savoir si l'on travaille pour une plateforme ou pas. La question est de savoir s'il y a un contrôle et un pouvoir de sanction. La Cour de cassation rappelle bien que l'existence d'une relation de travail dépend des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs."
 
En effet, les conditions dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs varient du tout au tout en fonction de la plateforme. "Les professionnels Wecasa sont libres de choisir ou de refuser les missions que nous leur proposons, rappelle le co-fondateur de Wecasa. Ce sont eux qui décident de leurs jours et heures de travail, de leurs vacances. Il n'y a pas de bonus ni de malus. Par ailleurs, nos professionnels peuvent choisir leur manière de travailler. Par exemple, une coiffeuse indépendante sera libre de choisir ses produits, sa méthode de travail, le temps à passer avec chaque client..."

Revoir la notion de dépendance économique

Par ailleurs, cette décision risque aussi d'amener à revoir aussi la notion de dépendance économique entre la plateforme et le travailleur, une notion là aussi toute relative et très variable d'une plateforme à une autre et d'un travailleur à un autre. Par ailleurs, le débat médiatique sur la dépendance économique passe souvent sous silence un paramètre important : la dépendance varie en fonction du niveau de qualification requis pour mener à bien la mission qui incombe au travailleur de plateforme. Plus l'expertise du professionnel croît, plus la relation entre l'indépendant et la plateforme s'équilibre.

"Dans le cas d'un livreur à vélo, la plateforme pourra sans difficulté se passer d'un prestataire et le remplacer avec un autre, sans dégrader son service. Dans d'autres, comme chez Wecasa, en plus de la compétence, une relation de fidélité s'installe le plus souvent entre le client et son professionnel (coiffeur, esthéticienne...). En cas d'arrêt du partenariat entre le professionnel et la plateforme, celle-ci risque donc de perdre une partie des clients habituels du professionnel. Les relations sont donc plus équilibrées."
 

Auto-entrepreneurs par choix

"80% de nos professionnels ont volontairement quitté leur statut de salarié pour se lancer dans la beauté à domicile, rappelle Antoine Chatelain. Et seuls 8% regrettent leur nouveau statut d'auto-entrepreneur. On est loin du débat public et médiatique qui présentent presque exclusivement les auto-entrepreneurs comme les victimes de plateformes qui leur imposeraient ce statut contre leur gré, les situations sont plus contrastées ! La majorité de nos indépendants le sont par choix, pour gagner en flexibilité et en indépendance, et ils en sont satisfaits !"
 
Pour le co-fondateur de Wecasa, "le succès d'entreprises de VTC ou de livraison de repas a trop souvent donné une image médiatique négative des plateformes de services, ce que nous déplorons. Le travail indépendant avec une plateforme n'est pas l'enfer 2.0 tel que bon nombre le décrivent. Ce n'est d'ailleurs pas non plus l'avenir du salariat, c'est simplement une nouvelle manière d'aborder le travail, avec moins de protection mais plus de liberté, qui conviendra à certains pour qui la priorité n'est pas le CDI. Reste à accompagner l'évolution de ce statut pour compléter les protections sociales manquantes, et le protéger des abus."

 


14 Décembre 2018