La crise n’exclut pas les entreprises associatives




L’entreprise associative est un type d’organisation désormais connu. Ses spécificités lui confèrent notamment des avantages non négligeables en matière de financement. Toutefois largement dépendantes des subventions publiques, les entreprises associatives subissent aujourd’hui les contrecoups directs du climat d’austérité, ce qui met à l’épreuve leur capacité d’adaptation.



Ni associations, ni entreprises, mais entre les deux, les entreprises associatives sont une forme hybride d’acteur économique. D’après Emmanuelle Marchal, ce type d’organisation a réellement gagné en visibilité à partir des années 1980(1) à la faveur de la réalisation d’études portant sur la nature de leurs activités.  Elles ont pour particularité d’allier un fonctionnement associatif à la poursuite d’un but apparenté à la production de biens ou de services.
Aujourd’hui, il est par exemple courant de voir des cabinets de conseil fonctionner selon un modèle associatif. Dans ce cas de figure, les entreprises associatives peuvent être le bras armé d’une collectivité locale et se trouver au centre d’un réseau de parties prenantes ayant recours à leurs services et à leur expertise particulière. C’est le cas de l’association Entreprise Rhône-Alpes International dont le travail de conseil et d’accompagnement des entreprises à l’export s’inscrit dans la politique régionale Rhône-alpine.

Pour Emmanuelle Marchal, le principal défi de l’entreprise associative consiste à faire cohabiter les principes de fonctionnement d’une entreprise et d’une association. Comme le rappelle l’auteur, l’entreprise « réunit du personnel rémunéré qui lui est lié par un contrat de travail, en vue de produire des biens et services qu’elle va écouler sur le marché ». L’association elle, regroupe des « membres » qui « peuvent avoir la qualité de sociétaires ou de simples adhérents et accomplir plus ou moins d’activités bénévoles selon la nature et le degré de leur implication dans la structure » dans le cadre d’un objectif « souvent généreux […] ou simplement convivial ».
L’entreprise associative est par essence contrainte d’effectuer un arbitrage constant entre ses intérêts entrepreneuriaux et ses intérêts associatifs. Cela n’est pas sans poser un certain nombre de problèmes managériaux : « le dévouement d’un bénévole peut s’accommoder difficilement de la revendication de la compétence professionnelle d’un salarié ; le désintéressement des membres de l’association peut aller à l’encontre de l’intérêt du personnel de l’entreprise » rappelle Emmanuelle Marchal en guise d’illustration. Dans ces conditions quel donc est l’intérêt du modèle associatif ?

Le grand avantage de l’entreprise associative est bien sûr de pouvoir bénéficier des ressources propres à chacun de deux types d’organisation auxquelles elle s’apparente. Une entreprise associative qui vend ses services sur le marché réalise des recettes qu’elle peut réinvestir. Par ailleurs, son action peut être subventionnée par l’État, financée par des cotisations associatives ou encore sponsorisée. L’entreprise constituée en association est donc en position de cumuler une multitude de sources de financement et peut « voir ses ressources […] décuplées, du fait même de la juxtaposition de deux dispositifs » entrepreneurial et associatif.
La combinaison des sources de financement fait partie intégrante du business model des entreprises associatives. Mais leur pérennité dépend étroitement de l’apport en deniers publics. Or selon de nombreux associatifs, ceux-ci ont tendance à baisser depuis 2010 et consécutivement à la crise. Face à l’affaiblissement des contributions de l’État et des collectivités territoriales, les entreprises associatives sont donc mises en demeure de se financer différemment. Il s’agit d’un défi nouveau susceptible de changer durablement le fonctionnement de ces acteurs hybrides.

L’entreprise associative présente des particularités uniques. Ses avantages proviennent notamment de la grande variété des types de financement auxquelles elle peut prétendre. Aussi, dans un contexte de resserrement budgétaire, ces entreprises d’un genre particulier et les associations en général sont, de fait, contraintes d’opérer un rééquilibrage de leurs ressources financières habituelles. La raréfaction des contributions publiques les amènera en effet vraisemblablement à solliciter davantage les autres sources de financement alternatives dont elles peuvent disposer : jouer sur les montants de leurs cotisations associatives, diversifier leurs prestations et en adapter le prix, ou encore solliciter le mécénat auprès d’entreprises est à cet égard autant de solutions potentielles qui illustrent la flexibilité caractéristique du modèle associatif.

(1) E., MARCHAL, « L'entreprise associative entre calcul économique et désintéressement » In Revue française de sociologie. 1992, 33-3. pp. 365-390.


30 Avril 2012