Azerbaïdjan : une économie en plein essor et en quête d’investisseurs




Au carrefour de l'Europe, de l'Asie et du Moyen-Orient, l'Azerbaïdjan est le premier partenaire commercial de la France dans le Caucase. Grâce initialement à ses richesses naturelles en hydrocarbures, le pays est devenu un acteur économique incontournable. La visite récente à Bakou, en juillet 2019, de Bruno LEMAIRE, ministre français de l'Économie et des Finances, a marqué une nouvelle étape dans le développement continu des échanges économiques entre les deux pays.



Bakou, point focal d'une économie en pleine mutation

Du pays de l'or noir du Caucase au défi de la diversification

Devant les étincelantes « flames towers » de Bakou, l'investisseur étranger n’a pas de doute : il se trouve dans un pays d’économie libérale, en plein boom. Cela n’a pas toujours été le cas : à la chute de l'URSS, plombé par des décennies de gestion socialiste, il est en déclin économique. Le succès d’un tel redressement, l'Azerbaïdjan le doit à la gestion éclairée de ses ressources en gaz et en pétrole. Un accord commercial avec la société BP en 1994, qualifié à l’époque de « contrat du siècle », inaugure une période de croissance économique exponentielle à deux chiffres. Les entreprise françaises Total et GDF Suez ne sont pas en reste et contractualisent à leur tour avec la compagnie nationale pétrolière et gazière d'Azerbaïdjan, la SOCAR (State Oil Company of Azerbaijan Republic) (1). Le rapport 2019 de la CNUCED indique que le pays reçoit, en 2018 (2), 1,4 milliards de $ en investissements directs de l'étranger (IDE). Aujourd’hui, ce sont toutes les grandes puissances qui participent à son développement : Chine, Russie, Europe. Et l'Azerbaïdjan l'a bien compris, en appliquant un tarif douanier avantageux pour ceux qui importent des biens d'équipements, à destination des secteurs définis par le pays comme prioritaires, et en créant des conditions favorables pour les investisseurs :
installation d'une zone de libre-échange à proximité du port d'Alyat (3) (situé à 65 km au sud de Bakou), que son directeur Taleh Ziyadov n'hésite pas à qualifier de « hub cinq étoiles » pour être au cœur des nouvelles routes commerciales (4) ; inauguration d'une nouvelle ligne de chemin de fer en 2017 entre Bakou (Azerbaïdjan), Tbilissi (Georgie) et Kars (Turquie). Reliant la mer Caspienne à l'Europe, cette voie ferrée peut transporter jusqu'à 1 million de passagers et 6,5 millions de tonnes de fret par an (5) ; création d'un gazoduc transanatolien (6) (TANAP : Trans Anatolian Natural Gaz Pipeline Project) en 2018 afin d'acheminer le gaz vers l'Europe, contribuant à sa sécurité énergétique. Le tube de plus de 2000 km relie, via la Géorgie et la Turquie, le gisement offshore de Shah Deniz en Azerbaïdjan à la frontière avec la Grèce et la Bulgarie. Il se prolongera ensuite vers la Grèce et l’Albanie jusqu’en Italie, sous le nom de gazoduc transadriatique (TAP).


Mieux encore, qui désire investir en Azerbaïdjan peut se rendre directement sur une plateforme numérique (http://azpromo.az/en/) délivrant licences et permis d'exploitation. Anticipant l’évolution des marchés, le pays souhaite d’ores et déjà diversifier son économie et sortir du « tout hydrocarbure ». C'est pourquoi dès 2016, le gouvernement s'engage dans un nouveau plan stratégique (7). Il identifie 11 secteurs de l'économie pour ses prochains investissements dont l’agriculture, les transports, le tourisme et les technologies de l’information et de la communication (8).


La France comme nouvel acteur économique du Caucase

Partenaire politique de toujours, la France aspire désormais à devenir un acteur économique incontournable dans cette région du Caucase. L'Azerbaïdjan est le 81ème partenaire commercial de la France et la 4ème destination des exportations françaises en CEI (9) (après la Russie, l'Ukraine et le Kazakhstan). Si la France exporte principalement des produits chimiques, du parfum et des cosmétiques (20%), ainsi que du matériel de transport ferroviaire (19%), elle importe 99% d'hydrocarbures naturels (pétrole et gaz). La stabilité de l'Azerbaïdjan, son choix d'un régime démocratique laïc, sa volonté de moderniser ses réseaux et ses vecteurs de transport sont autant d’éléments qui rassurent les investisseurs.
 
Et la France a un atout : elle est aimée des Azerbaïdjanais. Dès 1991, elle est le deuxième pays à reconnaître l'indépendance de l'Azerbaïdjan et noue rapidement des relations diplomatiques. Sensible à cette reconnaissance, le président Heydar ALIYEV choisit de s'y rendre en 1993 pour sa première visite officielle à l'étranger. Dès lors, le rapprochement entre les deux pays s’intensifie rapidement (10) : signature d'un traité d'amitié et de coopération le 20 décembre 1993 et ouverture d'une ambassade de l'Azerbaïdjan à Paris en 1994. Par ailleurs, les autorités de Bakou saluent l'implication de la France comme co-présidente du groupe de Minsk, qui travaille à une solution pacifique dans le conflit au sujet du Haut-Karabakh, occupé par l’Arménie depuis plus de 20 ans.
 
Sur le fondement de cette amitié politique, les relations économiques et culturelles vont croissantes, quels que soient les gouvernements français qui se succèdent depuis 1991. D'importants contrats sont signés en ce début de XXIème Siècle : en 2009, dans les transports pour l'extension du métro de Bakou avec l'entreprise Systra (filiale de la SNCF et de la RATP) ; en 2013, dans le secteur spatial avec Arianespace pour l'envoi, depuis Kourou, du premier satellite de télécommunication azerbaïdjanais. Aussi, la visite ministérielle à Bakou, en juillet 2019, s'inscrit dans cette arrivée à maturité des relations économiques. Selon le ministre, venu signer un contrat entre Alstom et l'Agence des chemins de fers azerbaïdjanais, de nouveaux projets en commun sont en gestation avancée dans le domaine des hydrocarbures et des énergies renouvelables ainsi que dans l'industrie de défense (11). Du MEDEF, accompagnant le ministre avec une délégation de chefs d'entreprises français, à l'AFD (12), récemment implantée en Géorgie, c'est une implication de plus en plus forte des acteurs français dans la région du Sud-Caucase.
 
 

Echanges culturels et touristiques comme rapprochement des cultures

Alexandre Dumas en serait fier et le touriste français étonné : une route porte son nom en Azerbaïdjan. Une école française a même vu le jour à Bakou en 2011. Fort de son potentiel touristique entre mer et montagne, le pays a de quoi enthousiasmer les citoyens du monde, et d’abord ceux de l’Europe voisine, avec l'organisation réussie de plusieurs événements internationaux comme l'Eurovision en 2012 (13), le grand prix de Formule 1 (14) ou la finale de l'Europa League en 2019 (15). Une politique plus souple de e-visas, un vol direct depuis Paris ainsi que plusieurs coopérations avec des villes et musées français (dont le département des arts de l'Islam au musée du Louvre) devraient favoriser l'essor d'un tourisme français souhaité par les deux gouvernements. Lors de son audition devant l'assemblée en janvier 2017, le secrétaire d'Etat Matthias FEKL (16), l'a souligné « le tourisme constitue un nouveau domaine de coopération de nos pays ». Entre route de la soie, BRI et nouvelle destination touristique, le pays décline ainsi de nombreux atouts pour séduire de nouveaux investisseurs français et européens.
 



28 Mars 2020