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Ces filières industrielles qui restent en France





Si on y regarde bien, la conjoncture économique de l’Hexagone n’est pas si atone que certains veulent le croire ou le faire croire. Il y a même quelques raisons de se réjouir : depuis plusieurs années le « made in France » se développe, et malgré une concurrence internationale forte, certaines industries ne quittent pas le territoire national pendant que d’autres y reviennent.



Le local : l’avantage de la proximité et de la marque « France »

Après avoir essayé de délocaliser leurs usines dans des pays où la main d’œuvre est moins chère qu’en France, certaines « industries » ont fini par revenir, et non des moindres. C’est le cas par exemple du joaillier Mauboussin qui produisait une grande partie de ses collections en Inde et Thaïlande. Par rapport aux ambitions passées, l’objectif pour l’enseigne est désormais de rapatrier la fabrication. Le Président-directeur général, Alain Némarq.%09http:/madame.lefigaro.fr/style/mauboussin-renoue-avec-le-made-in-france-210417-131908 , a ainsi annoncé vouloir « relocaliser 100% de la production d’ici au 1er janvier 2018 [en précisant qu’] il n’y a pas d’obstacle technique à cela ». Mauboussin n’est pas un cas isolé et plusieurs raisons peuvent expliquer se revirement. Tout d’abord le différentiel de coûts entre une pièce fabriquée en France et en Asie n’était pas suffisamment significatif pour justifier un tel éloignement (et les coûts de transport afférents). En outre, l’entreprise, qui réalise 70 à 75% de son chiffre d’affaires en France, « [avait tout] intérêt à avoir des sites de production à proximité, cela représente un gain de temps, de flexibilité ».

Autres arguments de poids, surtout d’un point de vue commercial : les clients sont de plus en plus enclins à acheter Français. En 2015, selon l’IFOP, 70% des Français se disaient même prêts à payer entre 5 à 10% plus cher pour des produits tricolores contre 50% en 2014. Cette tendance est d’autant plus vraie dans l’industrie du luxe où le label « made in France » est la garantie d’un savoir faire alliant luxe et haute technicité. Mais à côté des arguments mercantiles, malgré tout bienvenus quand ils profitent à la France, il y a un autre argument qui fait la force de la France : les qualifications du travailleur Français, productif et très bien formé.

Le savoir-faire français : une « assurance qualité » reconnue

Le savoir-faire Français est reconnu dans la coutellerie, la porcelaine, la chaussure, le luxe, mais aussi… dans le secteur des piscines. En effet, au 2ème rang mondial, après les Etats-Unis, la piscine tricolore se vend à travers le monde entier. Le marché est même en pleine croissance et s’est envolé d’après le site entreprendre.fr de « 14% en valeur et de 19% en volume, pour atteindre un niveau proche de l’année record de 2007 ». Selon Gilles Mouchiroud, président de la FPP (Fédération des Professionnels de la Piscine), « le marché continue d’évoluer favorablement en ce début d’année et les carnets de commandes se remplissent bien ». Les entreprises françaises, qui ne connaissent pas sur l’Hexagone de concurrence étrangère, se développent en particulier en Espagne, en Italie et Allemagne, sur la base de produits majoritairement conçus et fabriqués en France.

Ce qui fait recette, c’est avant tout le savoir-faire reconnu des 3900 entreprises membres de la Fédération des Professionnels de la Piscine et du Spa et les engagements de ces professionnels en termes de qualité et d’innovation. C’est par exemple la France qui préside le comité européen de normalisation sur les piscines familiales, créé à la demande des entreprises tricolores. C’est encore la France qui a été à la manœuvre pour faire appliquer à l’échelle de l’Europe de nouvelles normes communes en termes d’exigences générales et de sécurité. Depuis quatre ans, un label, Propiscines, a même été élaboré afin de garantir l’engagement des professionnels en matière de sécurité, d’assurances, de respect de l’environnement et de relation client. Pionnière à l’échelle de l’UE pour la mise en application de normes au service du public, la France est aussi l’un des seuls pays à sanctionner par un diplôme de l’Education nationale les techniciens de piscine. Un concours des meilleurs apprentis de France et des Meilleurs ouvriers de France distingue également l’excellence de quelques-uns. Mais la France a d’autres richesses que sa main d’œuvre.

Les filières qui savent tirer parti des richesses naturelles

La France n’a pas de pétrole mais elle n’est pas pour autant dénuée de richesses naturelles, outre nos paysages (difficiles à délocaliser) qui profitent à l’industrie du tourisme. La France bénéficie en effet d’un important potentiel en ressources minérales. Point d’or ou de diamants ici (ou alors très, très peu), mais du sable et de la roche ! L’existence de gisements et de nombreuses carrières en activité en témoigne. Dans certaines régions, comme en Rhône-Alpes, elles sont même parfois à moins d’une vingtaine de kilomètres de distance l’une de l’autre. Si la France dispose de champions mondiaux dans le secteur du BTP, ce n’est pas pour rien. En effet, la pierre est en France un matériau de proximité permettant le développement d’emplois locaux, non délocalisables.

L’extraction, la transformation et l’utilisation de ces minéraux est souvent opérée par des salariés « recrutés […] dans un rayon souvent inférieur à une dizaine de kilomètres, plutôt en territoire rural, là où le potentiel en emplois est souvent moindre ». Et les besoins en main d’œuvre sont nombreux et multiples : conducteurs d’engins, pilotes d’installations de traitement des granulats, techniciens de laboratoire, chefs de carrière, animateurs environnement…

En outre, après l’extraction, l’ensemble des métiers utilisés par la filière béton notamment, comme les conducteurs de camions toupie et de pompe à béton, les techniciens de laboratoires, professionnels de logistique et technico-commerciaux… est également recruté au niveau local. Dans la région PACA, pour la rénovation du stade Vélodrome à Marseille, les 140 000 tonnes de cailloux ont été livrées exclusivement par la seule carrière de Saint-Tronc, exploitée par la société des carrières et bétons phocéenne Brozon-Pérasso (CBBP) située au sud-est de la métropole. On imagine mal ces industries de la roche délocaliser la production. Peu médiatisée, la filière béton offre cependant sur les différents territoires français un important vivier d’emplois. D’après l’UNICEM Rhône-Alpes, « au total, en France, la filière (hors BTP) emploi directement 63 000 salariés qui tous, contribuent à dynamiser l’économie locale… Sur la durée, qui plus est, puisque ces emplois de proximité cumulent l’avantage d’être pérennes et non délocalisables. »

Industrie localisée en France par nécessité technique et économique, la filière béton prouve à elle seule qu’il est possible de travailler, de produire et de se développer, tout en travaillant exclusivement sur le territoire national, avec des salariés français. Aller chercher des économies de bouts de chandelles à l’autre bout du monde est un calcul de plus en plus risqué et, surtout, de plus en plus coûteux : même l’ouvrier chinois a depuis longtemps fait valoir son droit à être augmenté !


28 Septembre 2017